B. Fargeaud, La doctrine constitutionnelle sous la Quatrième République (2020)

Recension de B. Fargeaud, La doctrine constitutionnelle sous la Quatrième République. Naissance d’une nouvelle génération de constitutionnalistes, préf. G. Larcher, avant-propos O. Beaud, Paris, Dalloz, 2020, 564 p.

Review of B. Fargeaud, La doctrine constitutionnelle sous la Quatrième République. Naissance d’une nouvelle génération de constitutionnalistes, intro. G. Larcher, forew. O. Beaud, Paris, Dalloz, 2020, 564 p.

Résumé indisponible

C

’est sous ce titre, très explicite, que Benjamin Fargeaud publie l’ouvrage qu’il a tiré de sa thèse de droit public*. Soutenu à la fin de l’année 2018, ce travail a été distingué, l’année suivante, par le prix de l’Université Panthéon-Assas ainsi que par le premier prix de thèse du Sénat[1]. Dans ce volume de plus de cinq cents pages, le lecteur assistera – comme le sous-titre l’indique – à la « naissance d’une nouvelle génération de constitutionnalistes ». Toutefois, et contrairement à ce que ce titre modeste pourrait laisser entendre, l’ouvrage lui offrira bien davantage qu’un simple panorama intellectuel.

Cette étude, essentiellement doctrinale, se justifie par une conception du droit à la fois ample et réflexive. Certes, la doctrine est une « interprète inauthentique » du droit puisqu’il ne lui appartient pas de modifier directement les textes et les jurisprudences qui le composent (p. 4). Il n’en est pas moins vrai que,

À cet égard, elle n’est pas seulement un miroir plus ou moins déformant du droit positif mais aussi l’une de ses principales sources indirectes. Son étude est particulièrement recommandée en matière de droit constitutionnel, « discipline qui se trouve naturellement au carrefour entre le droit public, la science politique et la philosophie politique » (p. 6). On pourrait ajouter, avec l’auteur, que l’absence d’un véritable juge constitutionnel confère un surcroît d’importance à la doctrine car elle est alors la principale instance de réflexion sur droit constitutionnel[2]. Dès lors, il est nécessaire de montrer que cette instance est rarement unanime, et que la doctrine se partage entre différents courants rivaux. Fondée sur une conception large de la matière juridique, la thèse de Benjamin Fargeaud se présente, très explicitement, comme une étude de droit politique.

Comme le souligne l’auteur, le point de vue retenu est essentiellement interne. Ce sont donc surtout des contenus de pensée qui sont ici présentés et discutés. Il faut souligner que ces productions doctrinales sont toujours rapportées au droit positif de la Quatrième République ainsi qu’à sa pratique – parfois élastique. L’articulation ainsi opérée entre « le droit dans les têtes », « le droit dans les textes » et ce que nous pourrions appeler « le droit dans les mœurs » est vraiment remarquable[3]. Du reste, et bien qu’il privilégie l’approche interne, Benjamin Fargeaud ne s’interdit pas, à l’occasion, de recourir au point de vue externe. Quand le besoin s’en fait sentir, il complète volontiers son exposé par d’instructifs développements prosopographiques. Cette démarche équilibrée s’avère particulièrement heureuse dans la seconde partie de l’ouvrage, où l’auteur contraste la « doctrine universitaire » et la « doctrine technicienne » (celle du personnel politique, des conseillers d’État, des fonctionnaires des assemblées, etc.). Non seulement ces deux types de juristes n’ont pas défendu les mêmes idées, mais leurs conceptions respectives n’ont pas rencontré le même succès.

Pour mener à bien sa démonstration, Benjamin Fargeaud s’est appuyé sur une bibliographie dont il faut saluer la richesse. Elle fait naturellement la part belle aux publications savantes – ce qui permet de rendre incidemment justice à certains auteurs un peu oubliés. Les articles publiés par la doctrine dans la presse généraliste, destinés à un plus large public, sont également exploités de manière habile. Enfin, l’auteur a pris soin de dépouiller certains fonds d’archives et de s’intéresser aux débats parlementaires. Le recours à ces sources est très heureux car elles offrent, à l’occasion, des éclairages aussi inattendus que stimulants.

Afin de donner au lecteur une idée claire de l’ouvrage, nous commencerons par en présenter, de manière synthétique, les principaux développements (I). Puis, nous évoquerons ce que nous semblent être ses principaux apports (II).

 

I. Vue synthétique de l’ouvrage

 

Conformément au canon en vigueur dans les facultés de droit, l’ouvrage se compose de deux parties. Chacune d’entre elles est découpée en deux titres, eux-mêmes subdivisés en deux chapitres.

La première partie montre comment la doctrine entendait « façonner le droit constitutionnel » de la Quatrième République – entreprise dont les résultats allaient s’avérer décevants. Il s’ensuivit un certain désintérêt pour le droit de la Constitution à proprement parler.

Au lendemain de la Libération, une bonne partie des juristes aspiraient à une rénovation institutionnelle profonde. Beaucoup estimaient qu’il fallait renouveler les mécanismes parlementaires tout en dotant l’État d’un appareil exécutif plus stable et plus efficace qu’il ne l’avait été sous la république précédente. La dissolution de la chambre basse – désormais conçue comme un instrument propre à discipliner la majorité – devait notamment être facilitée. Héritiers intellectuels de Carré de Malberg, certains auteurs préconisaient aussi l’introduction de mécanismes référendaires, susceptibles de contrebalancer le caractère essentiellement représentatif de la démocratie française. Enfin, une part importante de la doctrine plaçait ses espoirs dans le contrôle juridictionnel de la constitutionnalité des lois.

Par leurs publications et leurs interventions, les juristes universitaires tentèrent d’influencer les deux assemblées constituantes successives. Peu présents en leur sein – malgré le mythe soigneusement entretenu d’une « Constitution de professeurs » (voir p. 57 sqq.) –, ils n’y parvinrent guère. Les représentants du peuple préférèrent s’en tenir « aux principes traditionnels du “parlementarisme à la française” », lesquels consacraient le mécanisme représentatif et assuraient la prééminence politique de la chambre basse (p. 131). Au vu des espérances qu’elle avait nourries, la doctrine majoritaire accueillit donc avec tiédeur et circonspection la Constitution du 27 octobre 1946. La pratique qu’engendrerait ce texte allait se révéler encore plus décevante.

Alors que la seconde assemblée constituante était encore à l’œuvre, de nombreuses voix s’élevèrent pour souligner les insuffisances d’une « rationalisation du parlementarisme » manifestement vouée à l’échec. La trajectoire intellectuelle de Boris Mirkine-Guetzévitch est à ce titre exemplaire. Grand promoteur du « parlementarisme rationalisé » durant les années 1920, il conclut à son échec dès la fin de la décennie 1940. Constatant l’incapacité du droit constitutionnel à stabiliser et à renforcer le gouvernement, une partie de la doctrine, au même moment, commença à tourner ses regards vers le chef de l’État. Elle voulut en faire une sorte de « gardien de la Constitution » – sans attacher à cette formule la connotation autoritaire que son inventeur, Carl Schmitt, lui avait imprimée. Cette lecture présidentialiste des institutions, difficilement compatible avec la lettre constitutionnelle, était toutefois loin de faire l’unanimité.

La résurgence inopinée des décrets-lois causa à la doctrine une nouvelle déconvenue. La majeure partie des professeurs de droit, jugeant la délégation de la compétence législative contraire à l’article 13, l’estimait proprement inconstitutionnelle. Débordé par la pratique, le droit constitutionnel semblait donner une nouvelle preuve de son inefficacité. La chose paraissait d’autant plus sûre que le mécanisme de contrôle de la constitutionnalité des lois, prévu par le texte de 1946, ne prospéra guère. Les intenses controverses qui, à ce sujet, avaient agité la doctrine de la Troisième République s’éteignirent doucement. En somme, le droit constitutionnel semblait avoir échoué : il n’était pas parvenu à encadrer pleinement la pratique politique. Dès lors, la notion même de constitution fut frappée de discrédit : à quoi bon se consacrer à l’étude d’un objet si manifestement caduc ?

Si la doctrine du droit public se détourna rapidement de l’étude « traditionnelle » du droit constitutionnel, ce fut pour réinvestir ses efforts dans d’autres domaines. Dans la seconde partie de l’ouvrage, Benjamin Fargeaud montre comment elle eut à cœur de refonder son objet, tant sur le plan théorique que pratique.

Cette réforme concerna tout d’abord les méthodes employées : la doctrine se tourna massivement vers une « science politique » jugée plus proche des réalités pratiques que ne l’était l’étude classique du droit constitutionnel. Avec nuance, l’auteur montre toutefois que cette « seconde institutionnalisation[4] » de la science politique recouvrait, en réalité, des conceptions et des approches très diverses. Aux vues méthodologiques de Maurice Duverger s’opposaient celles de Marcel Prélot, de Georges Burdeau et d’autres encore – de sorte que la science politique de l’époque s’apparentait moins à une pratique unifiée qu’à un simple « label ». Quoi qu’il en soit, de nouvelles sous disciplines commencèrent à se développer, comme l’histoire des idées politiques et la sociologie du droit (notamment sous l’influence de Jean-Jacques Chevallier et de Roger Pinto).

Bien qu’elle fût combattue par une partie de la doctrine, cette refonte méthodologique s’accompagna d’un renouvellement thématique. L’attention de la doctrine, qui s’était longtemps focalisée sur la dimension libérale du constitutionnalisme, se déplaça vers une autre composante des régimes occidentaux : la démocratie. La théorie traditionnelle de la représentation en fit notamment les frais. Au même moment, des auteurs aussi différents que René Capitant et Charles Eisenmann élaborèrent leurs conceptions respectives de la démocratie (« spiritualiste » pour l’un, « relativiste » pour l’autre). Bien entendu, ces réflexions étaient puissamment stimulées par le défi que les républiques socialistes – qui se voulaient des « démocraties réelles » – lançaient aux régimes occidentaux – qualifiés de « démocraties formelles ». Cette question nourrit de vives polémiques, notamment entre Maurice Duverger et Georges Vedel.

Le contexte politique fournit à la doctrine de la Quatrième République un autre sujet de réflexion privilégié : le fédéralisme. Cette notion – très diversement théorisée – était l’objet d’un engouement intellectuel qui débordait largement les facultés de droit. À l’heure des décolonisations, la doctrine espérait y trouver un moyen de repenser et de réformer l’Union française ; c’est-à-dire une alternative à la politique coloniale traditionnelle. On ne peut pas dire que ce projet se soit concrétisé conformément aux vœux de ses promoteurs. Bien entendu, la théorie du fédéralisme a aussi été employée, en doctrine, pour penser l’émergence des Communautés européennes. De vifs désaccords se sont exprimés, à cet égard, entre les partisans du fédéralisme démocratique et les tenants de sa variante fonctionnaliste. Comme on le sait, les débats doctrinaux relatifs à la Communauté européenne de défense ne furent pas moins virulents.

Caractérisée par son fort engagement politique, la doctrine constitutionnelle a naturellement cherché à réformer les institutions de la Quatrième République. En prônant le « parlementarisme authentique » ou encore le « régime présidentiel », elle a surtout entendu conférer davantage de stabilité et de poids politique aux organes exécutifs. Toutefois – et exception faite de Marcel Prélot –, la faculté de droit a été peu entendue par les organes parlementaires qui confectionnèrent la « réformette » de 1954. Surtout, la doctrine universitaire fut reléguée au second plan par une « doctrine praticienne », essentiellement composée de conseillers d’État et de fonctionnaires des assemblées. Contre l’avis des professeurs, cette élite de « techniciens » entendait rationaliser le parlementarisme par le biais de l’artifice constitutionnel. En somme, « 1958 marque la victoire des “légistes” ignorant l’acquis de dix années de recherche en science politique » (p. 482). Il semble donc que, globalement, la doctrine constitutionnelle ait échoué. Comme nous le verrons, ce constat doit néanmoins être nuancé.

 

II. Apports de l’ouvrage

 

Comme on le voit, le plan de l’ouvrage, fortement structuré, est habilement conçu. Tout en autorisant une solide démonstration, il permet à l’auteur de présenter les débats étudiés selon un ordre à la fois thématique et chronologique. Ainsi, le lecteur suit sans difficulté les étapes d’un raisonnement qui ne se perd jamais en répétitions ou en considérations superflues. Les annonces et les conclusions des chapitres et des parties sont particulièrement soignées, ce qui facilite encore l’intelligibilité du propos. Le style de M. Fargeaud renforce encore cette impression. Plus soucieux d’être entendu qu’admiré, l’auteur fait preuve d’une salutaire sobriété. Le comprenant sans peine, on le suit avec plaisir. Solidement construite et simplement écrite, la thèse présente, en somme, de remarquables qualités formelles.

Le fond du propos n’est pas de moindre facture. Il est certain, en premier lieu, que l’objet étudié méritait amplement de l’être. Comme le souligne l’auteur, depuis une petite vingtaine d’années, on observe un regain d’intérêt pour les questions d’histoire constitutionnelle. Or il apparaît que, sans négliger la Cinquième République, ces récents travaux ont surtout mis l’accent sur la Troisième – « âge d’or » supposé de la pensée constitutionnelle française. En s’attaquant à la « mal aimée » et à sa doctrine, Benjamin Fargeaud a manifestement contribué à combler un vide historiographique. Or, le chaînon manquant qu’il nous présente est plus précieux qu’on ne pourrait le croire de prime abord. À bien des égards, les auteurs étudiés sont les derniers héritiers du droit constitutionnel tel qu’il se pratiquait dans les années 1930. En attachant autant de prix à la pratique politique qu’au texte constitutionnel, beaucoup s’inscrivent dans la perspective méthodologique tracée avant-guerre par Joseph-Barthélémy[5]. Il n’est pas étonnant, dans ces conditions, que cette doctrine ait largement participé à la naissance de la science politique française. Il nous semble d’ailleurs que la thèse de Benjamin Fargeaud est également une contribution importante à l’histoire de cette dernière discipline. À ce propos, il pourrait être intéressant de prolonger la réflexion proposée par l’auteur. Il est en effet possible que le « tournant politiste » de la doctrine française n’ait pas seulement résulté d’une évolution des idées constitutionnelles. Il se pourrait que cette mutation ait aussi été stimulée par une littérature d’avant-guerre dont les méthodes étaient étrangères à toute considération juridique. On peut songer, par exemples, aux réflexions que Moisey Ostrogorsky ou Robert Michels ont consacrées aux partis politiques, ou encore aux études de géographie électorale menées par André Siegfried[6].

Un autre mérite de cette recherche, en deuxième lieu, est de proposer une véritable démonstration. Pour le dire brièvement : la doctrine constitutionnelle de la Quatrième République aurait échoué. Désappointés par les piètres résultats de la « rationalisation du parlementarisme » opérée en 1946, les juristes universitaires se seraient détournés des enjeux textuels et de la technique constitutionnelle. Ce désintérêt expliquerait que, dans sa fonction prescriptive, la doctrine universitaire ait pu être concurrencée, et finalement dépassée, tant par les parlementaires que par les « techniciens » de la haute fonction publique – la confection de la Constitution du 4 octobre 1958 en témoigne. Conscient que le rôle de la doctrine n’est pas exclusivement prescriptif, l’auteur tempère néanmoins cet échec. Sur le plan théorique, l’apport des professeurs de droit public est loin d’avoir été nul. Par leurs travaux, ils auraient ouvert de nouvelles perspectives méthodologiques et exploré des thèmes jusque-là délaissés (démocratie, régime autoritaire, fédéralisme, etc.). Ce faisant, la doctrine de Quatrième République aurait accompagné, sur le plan intellectuel, la mutation du système institutionnel. Prenant acte du processus de démocratisation, largement entamé sous la Troisième République, elle aurait reconnu l’inévitable prééminence politique du gouvernement dans le parlementarisme contemporain. Ainsi, le constat d’échec dressé par Benjamin Fargeaud demeure nuancé : même si elle n’est guère parvenue à se faire entendre du pouvoir de révision, la doctrine de la Quatrième République a su faire œuvre théorique. On peut seulement regretter que ce jugement plein de finesse ne soit pas accompagné d’une réflexion plus abstraite sur la doctrine elle-même. En distinguant plus nettement ses différentes fonctions (notamment sa capacité à influencer, à décrire et à prévoir), il aurait peut-être été possible d’affiner encore le jugement.

Quoi qu’il en soit, et en troisième lieu, il faut saluer la portée critique de ce travail. Il n’est pas rare, en effet, que l’historien des idées s’engage dans une confortable hagiographie. Cette stratégie d’écriture présente un intérêt évident : en louangeant les auteurs qu’il interprète, l’exégète rehausse indirectement son propre prestige. Comme on l’aura compris au vu de sa démonstration générale, Benjamin Fargeaud se garde bien d’un tel travers. La chose est d’autant plus appréciable que les critiques formulées, finement argumentées, sont particulièrement convaincantes. Certains auteurs consacrés n’en sortent pas indemnes. C’est notamment le cas de Maurice Duverger, dont Benjamin Fargeaud étudie aussi bien l’œuvre doctrinale que la production journalistique. L’une et l’autre lui paraissent bien discutables, tant le « professeur-journaliste » a multiplié les incohérences et les volte-face. A contrario, l’auteur a à cœur de rendre leur éclat à des figures doctrinales qui furent parfois sous-estimées. Il en est ainsi de Marcel Prélot, qui défendit une forme de science politique originale et nettement distincte de celle de Duverger. Naturellement, les travaux de Georges Burdeau font également l’objet d’une lecture minutieuse. Il apparait que son grand œuvre est sans doute le « seul traité de droit constitutionnel d’ampleur » qui ait vu le jour sous la Quatrième République (p. 236). La discussion de ces œuvres, menée de manière savante, contextuelle et critique, est particulièrement précieuse.

On remarquera, enfin, que la thèse de Benjamin Fargeaud renouvelle l’interprétation classiquement reçue de certaines questions. Sans prétendre à l’exhaustivité, en voici quelques exemples. La thèse démontre, notamment, que l’on a pris conscience beaucoup plus précocement qu’on ne le croyait des imperfections de la Constitution du 27 octobre 1946. Dans un ordre d’idées voisin, la fameuse question des décrets-lois trouve ici un traitement remarquable. La part qu’a pris la doctrine dans sa construction y est méticuleusement exposée, ce qui donne au problème une dimension nouvelle. Pareillement, et malgré sa profonde équivocité, la question du « fédéralisme » est abordée avec doigté et sans schématisme. Des pans entiers du constitutionnalisme français, aujourd’hui largement oubliés, refont ainsi surface. C’est notamment le cas de la « doctrine coloniale », dont Benjamin Fargeaud donne un aperçu aussi riche qu’instructif. De même, les développements consacrés à la « concurrence des révisionnismes » (p. 452 sqq.) sont en tous points remarquables. Pour traiter de cette question – qui concerne aussi les origines de la Vème République –, l’auteur tire un grand profit des débats parlementaires et des archives. De tous ces légers déplacements de la perspective ressort une image de la Quatrième République bien différente de celle qu’on en pouvait avoir.

Non seulement la thèse Benjamin Fargeaud comble un vide historiographique mais elle le fait de manière très convaincante. Solidement structurée, elle présente une démonstration forte qui peut s’appuyer sur une connaissance approfondie du sujet. Ses développements, lucides et critiques, renouvellent la lecture que l’on avait de l’objet. Cet ouvrage est assurément destiné à devenir une référence importante pour l’histoire contemporaine des idées juridiques et politiques.

 

Renaud Baumert

Renaud Baumert est professeur de droit public à l’Université Cergy-Paris (cyu) et membre du Centre de philosophie juridique et politique (cpjp).

Pour citer cet article :
Renaud Baumert «B. Fargeaud, La doctrine constitutionnelle sous la Quatrième République (2020) », Jus Politicum, n° 26 [https://www.juspoliticum.com/article/B-Fargeaud-La-doctrine-constitutionnelle-sous-la-Quatrieme-Republique-2020-1412.html]